Discrimination : un discours homophobe peut constituer une discrimination à l’embauche, même en dehors de tout processus de de recrutement !
CJUE, 23 avril 2020, aff. C-507/18
Dans cette affaire, un avocat italien avait affirmé à la radio qu’il ne souhaitait pas collaborer avec des personnes homosexuelles au sein de son cabinet.
Une association d’avocats défendant en justice les droits des personnes LGBTI a attrait l’avocat en justice et le Tribunal de Bergame l’a condamné à verser 10 000€ à cette association en réparation du préjudice ! 😊
L’avocat a fait appel puis a porté sa cause devant la Cour de cassation italienne, cette dernière a alors interrogé la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) car une problématique juridique s’est posée : sur quel fondement condamner des déclarations déconnectées de tout contexte professionnel et donc de tout processus de recrutement ?
La CJUE a rappelé à cette occasion que le droit de l’UE dispose d’une directive dite « anti-discrimination », n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, qui s’applique de manière autonome et uniforme ce qui veut dire que l’interprétation de la Cour vaudra pour tous les Etats membres de l’UE.
La CJUE a ainsi considéré que la notion essentielle de « condition d’accès à l’emploi, (…) ou au travail), telle que contenue dans la directive ne doit pas être entendue de manière restrictive, et que des déclarations publiques qui sous-tendent une politique de recrutement homophobe, s’inscrivent sans aucun doute dans cette notion.
Bien entendu, une telle déclaration à la radio produit son effet en dissuadant la population discriminée, de postuler à un tel emploi.
Il appartient alors au juge national de vérifier s’il existe un lien entre les déclarations de la personne et la politique de recrutement de l’employeur, en se fondant par exemple sur ces circonstances telles que l’influence au sein de l’entreprise de la personne qui a tenu les déclarations ou encore le contexte public ou privé des déclarations.
La CJUE a par ailleurs précisé que la liberté d’expression n’était pas entravée.
Il paraît utile de rappeler que la liberté d’expression n’est pas un droit absolu et ne peut être tolérée lorsqu’elle prend la forme d’invectives ou de propos discriminatoires.
L’interprétation de la CJUE est bien évidemment heureuse en tant que le droit de l’UE dispose d’outils efficaces pour renforcer la lutte contre les discriminations, quelles que soient les formes qu’elles peuvent prendre 😊