Cass. soc., 15 septembre 2021, n°19-19.563https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000044105854?page=1&pageSize=10&query=19-19.563&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=juri&typePagination=DEFAULT

Il s’agit d’un arrêt qui s’inscrit dans la lignée de la jurisprudence constante sur la question du dépassement de la durée légale de travail pour un salarié à temps partiel.

Pour rappel, aux termes de l’article L.3123-9 du Code du travail, « Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée de travail accomplie par un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, au niveau de la durée de travail fixée conventionnellement. »

En l’espèce, un salarié agent de sécurité embauché à temps partiel à raison de 50h00 par mois, a été amené, du fait de l’accomplissement d’heures complémentaires, à travailler à hauteur de 36.75 heures de travail au cours d’une semaine de février 2015, ce qui a eu pour effet de porter sa durée de travail au-delà de la durée légale de travail (de 35h00).

Il a donc agi au Conseil de prud’hommes pour obtenir la requalification de son contrat en temps complet à compter de la semaine de février 2015 jusqu’à la fin de son contrat (celui-ci ayant été rompu en décembre 2016 à la suite d’une rupture conventionnelle).

La demande du salarié était fondée sur l’état de jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle le fait pour un salarié d’avoir, par le biais d’heures complémentaires, atteint ou dépassé la durée légale de travail justifie la requalification en contrat à temps plein à compter de la date de dépassement, quand bien même ce dernier n’a été que temporaire (Cass. soc., 12 mars 2014, nº 12-15.014).

Contre toute attente, la cour d’appel a rejeté la demande du salarié en estimant que « dès lors que la durée de travail était fixée mensuellement, la réalisation, durant une semaine, d’un horaire supérieur à la durée légale hebdomadaire, alors que l’horaire mensuel demeurait inchangé, ne saurait entraîner la requalification de ce contrat à temps partiel en contrat de travail à temps plein ».

Bien heureusement, la Cour de cassation a invalidé le raisonnement de la cour d’appel et a donné raison au salarié 😊

Elle a ainsi précisé que la durée légale ne doit pas être atteinte au cours d’une semaine, sous peine de justifier la requalification du contrat à temps plein à compter de la semaine ou du mois concerné par le dépassement :

« En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que le salarié avait accompli 1,75 heure complémentaire au mois de février 2015 et qu’au cours de la première semaine de ce mois, le salarié avait effectué 36,75 heures de travail en sorte que l’accomplissement d’heures complémentaires avait eu pour effet de porter la durée du travail accomplie par le salarié à un niveau supérieur à la durée légale du travail, ce dont elle aurait dû déduire que le contrat de travail à temps partiel devait, à compter de ce dépassement, être requalifié en contrat de travail à temps complet, la cour d’appel a violé les textes susvisés »

L’apport du présent arrêt est de préciser que la règle prévue à l’article précité L.3123-9 du Code du travail selon laquelle le salarié à temps partiel ne saurait être amené à travailler à temps complet, s’applique à l’identique, que le temps de travail du salarié soit décompté à la semaine ou au mois. Ainsi, dès lors que le salarié à temps partiel qui est amené à accomplir un nombre d’heures complémentaires, vient à dépasser le plafond de 35h00 au cours d’une semaine  donnée, il peut obtenir une requalification de son contrat à hauteur d’un temps complet.

Dans les deux cas, on apprécie le temps de travail sur la semaine, et non sur le mois.

Une question reste en suspens, concernant les salariés à temps partiel qui travaillent dans le cadre d’un aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine – prévoyant une alternance entre périodes hautes et basses. Les concernant, faut-il apprécier sur la semaine le respect du nombre d’heures complémentaires et de la limite conduisant à ce que la durée du travail reste inférieure à la durée légale ? Ou l’appréciation se fait-elle en fin de période au regard de la durée moyenne effectuée par le salarié tout au long de la période ?

En attendant que la Cour de cassation soit amenée à se prononcer sur question, nous sommes d’avis à penser qu’il faut appliquer la limite prévue à l’article L. 3123-9 de manière hebdomadaire à toutes les situations. Une seule entorse existe, prévue à l’article L.3123-2 du Code du travail s’agissant du cas du salarié qui travaille dans le cadre d’un temps partiel annualisé pour raisons familiales qui permet d’alterner périodes de travail à temps complet et périodes non travaillées.

En dehors de ce cas, il suffit qu’un.e salarié.e ait travaillé au niveau de la durée légale de travail (35h00) au cours d’une seule semaine, pour qu’il puisse obtenir une requalification de son contrat à temps plein et le rappel de salaires qui en est assorti et ce, peu important que le salarié n’ait pas travaillé au-delà de la durée légale après la semaine concernée par le dépassement.

Si vous pensez vous trouver dans ce cas de figure, n’hésitez pas à nous consulter pour vous renseigner sur vos droits et le cas échéant, établir le calcul du rappel de salaire qui vous est dû ! 😊